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Dossier de Fabien Rousseau
LES ORIGINES
Dans les années 60, le mouvement pour les droits civiques bat son plein aux Etats-Unis notamment avec le débat sur l'intégration des minorités. Durant cette période, le scénariste Stan Lee et l'illustrateur Jack Kirby de Marvel Comics, imaginent une histoire baptisée The Mutants avant de choisir X-Men en raison du gêne X qui provoque une mutation génétique se manifestant à l'adolescence pour développer des facultés hors normes telles que maîtriser l'un des quatre éléments pour certains. Le premier épisode paraît en septembre 1963 avec un discours politique et philosophique mis en évidence à travers une allégorie sur la discrimination. "Les étranges X-Men" doivent non seulement faire face à une humanité qui les rejette et les montre du doigt mais également protéger celle-ci des attaques de mutants mal intentionnés. Le Professeur Charles Xavier, puissant télépathe paraplégique et fondateur d'une école pour jeunes surdoués guide cette communauté de surhommes constituée de Cyclope, Jean Grey, Iceberg, Angel et le Fauve qui se battent contre le terrible Magnéto et sa Confrérie des mauvais mutants. Dans le premier numéro de Giant Size X-Men en mai 1975, le scénariste Len Wein et le dessinateur Dave Cockrum intégrent de nouveaux membres comme Serval, Tornade, Colossus, Diablo, le Hurleur, Feu du soleil et Epervier. Sur près de quatre décennies, l'équipe n'a cessé de s'élargir par le biais d'autres séries de comics dont Les Nouveaux Mutants lancée par Chris Claremont et Bob McLeod en 1982. Les super-héros ont été confrontés à de redoutables adversaires comme Sebastian Shaw du Club des damnés, le Phœnix noir ou Apocalypse.
La saga connaît également une extension dans l'animation avec des séries comme X-Men (1992-1997, 76 épisodes) précédée par un pilote intitulé Pryde of the X-Men (1989), X-Men: Evolution (2000-2003, 52 épisodes) racontant les jeunes années des mutants puis Wolverine et les X-Men (2008, 26 épisodes). En 1996, Marvel produit également Génération X, un téléfilm réalisé par Jack Sholder et qui devait être le pilote d'une série mettant le Hurleur et Emma Frost au premier plan.
A la fin des années 70, les super-héros Marvel ne bénéficient pas d'un traitement de faveur en matière de transposition. Ainsi des figures marquantes comme Captain America, Spider-Man ou Hulk sont employés dans des téléfilms (souvent exploités dans les salles européennes) avec des acteurs habillés de costumes kitsch s'illustrant dans des intrigues sans la moindre ambition. La décennie suivante, Marvel se cantonne dans le petit budget avec les téléfilms Hulk et Nick Fury. Punisher sort en salles mais le nouveau Captain America est uniquement réservé au circuit vidéo. En 1998, Blade marque enfin un premier pas vers des adaptations plus ambitieuses.
Le projet d'adapter les X-Men débute en 1984 quand Gerry Conway et Roy Thomas, rédacteurs en chef de Marvel Comics proposent un script à la société Orion qui pose une option sur les droits mais connaîtra des problèmes financiers. Cinq ans plus tard, Stan Lee et Chris Claremont, scénariste du comic-book, contactent la société Carolco Pictures pour mettre en chantier un long métrage produit par James Cameron et réalisé par Kathryn Bigelow. Bob Hoskins et Angela Bassett sont évoqués pour les rôles de Wolverine et Tornade. De son côté, Cameron préfère s'atteler à une version moderne de l'Homme-araignée qui est bientôt entraînée dans un véritable imbroglio juridique (voir dossier Spider-Man).
Le vent tourne en 1994 lorsque la productrice Lauren Shuler Donner (épouse de Richard Donner, auteur du Superman de 1978) achète les droits pour la Fox et engage Andrew Kevin Walker qui avait signé le script de Seven. Le scénario ne donne pas satisfaction et il est réécrit par d'autres scénaristes (dont un certain Joss Whedon) pour finalement ne recevoir aucune validation. A la réalisation, Brett Ratner est envisagé puis Robert Rodriguez décline l'offre. Réalisateur d’Usual Suspects, Bryan Singer souhaite diriger un film de science-fiction et la Fox lui propose alors Alien, la résurrection. Son ami, le producteur Tom DeSanto lui parle du comic-book mais Singer se montre d'abord réticent avant de se laisser convaincre par le matériau d'origine. Totalement néophyte dans le domaine, Singer s’imprègne des thèmes et des relations entre chaque individus à travers les comics et la série animée. Le traitement de Singer et DeSanto est jugé trop coûteux et le scénariste David Hayter remanie le script afin de réduire le budget.
Plusieurs noms plus ou moins connus sont pressentis pour les différents personnages : Jim Caviezel pour Cyclope, Terence Stamp pour Magnéto, Angela Bassett, Jada Pinkett Smith et la chanteuse Janet Jackson pour Tornade, Sarah Michelle Gellar pour Malicia et Kevin Nash pour Dents-de-Sabre. Pour incarner Wolverine, Russell Crowe est d'abord envisagé puis le rocker Glenn Danzig est approché. Le choix se porte finalement sur Dougray Scott qui sera retenu sur un autre tournage.
X-MEN (2000)
Réalisé par Bryan Singer avec Patrick Stewart (Professeur Charles Xavier), Ian McKellen (Erik Lehnsherr/Magneto), Hugh Jackman (Logan/Wolverine), Famke Janssen (Jean Grey), James Mardsen (Scott Summers/Cyclope), Anna Paquin (Malicia), Halle Berry (Ororo Munroe/Tornade), Bruce Davison (sénateur Robert Kelly), Rebecca Romijn Stamos (Mystique), Ray Park (Crapaud), Tyler Mane (Dents de sabre).
"Nous ne sommes pas ce que vous croyez." (Charles Xavier s’adressant au sénateur Kelly)
Cyclope, Jean Grey et Tornade, un groupe de jeunes mutants mené par le Professeur Xavier, tentent de convaincre le sénateur Kelly et la société du bien fondé de leur institut. Dans le même temps, Malicia et Logan décident de se joindre à leur équipe. Les X-Men vont devoir combattre une autre confrérie composée de Dents de sabre, Mystique et Crapaud dont le maître Magneto ambitionne de réduire l'humanité ànéant.
Au vu du potentiel comic-book, l'univers des X-Men n'était pas facile à adapter au langage cinématographique et Bryan Singer réussit avec brio, a transposé dans ce premier chapitre, l'esprit du célèbre comics en y apportant une vision personnelle et moderne. Plutôt que de s'inspirer d'un épisode particulier, il choisit de rassembler des personnages issus de différentes époques de la série et d'uniformiser leurs costumes à l'origine plus fantaisistes.
Sans pour autant déverser les flots d'effets spéciaux coutumiers, le cinéaste tempère habilement les scènes d’action avec un scénario qui fait l'objet d’un véritable postulat contre l'exclusion en véhiculant un message de tolérance. D'ailleurs, le mot est lancé dès la séquence d'ouverture dans le camp de concentration. Le film se veut également une métaphore sur la lutte idéologique entre Martin Luther King et Malcolm X symbolisée par le Professeur Xavier et Magneto, l'un aspirant à une cohabitation pacifique avec les hommes alors que l'autre veut s'imposer par la force.
En incarnant ces leaders symboliques, Patrick Stewart (le capitaine Picard de Star Trek Next Generation) et Ian McKellen (Gandalf dans Le Seigneur des Anneaux), deux comédiens issus de la prestigieuse école shakespearienne livrent une prestation toute en nuance et sobriété. Le récit se focalise principalement sur le personnage de Logan (Wolverine en VO et Serval en VF) qui a les traits de Hugh Jackman, acteur australien habitué aux rôles de séducteur. Ce dernier s'est immiscé à la perfection dans la peau de ce mutant déchiré entre haine et compassion, afin de lui conférer une réelle profondeur (la quête de son identité) et une dimension humaine notamment dans sa relation avec Malicia (l'étonnante Anna Paquin), une adolescente pourvue d'un don qui lui apparaît comme une malédiction.
Cette version cinéma apporte un nouveau souffle au mythe en donnant du relief à cette équipe hors du commun qui ne se révèlera pas sans failles psychologiques. Le succès de X-Men a relancé la mode des comics sur grand écran puisqu'il a ouvert la voie à une autre adaptation réussie, celle de Spider-Man.
X-MEN 2 (2003)
Réalisé par Bryan Singer avec Patrick Stewart, Ian McKellen, Hugh Jackman, Brian Cox (William Stryker), Famke Janssen, James Mardsen, Anna Paquin, Halle Berry, Rebecca Romijn Stamos, Alan Cumming (Kurt Wagner/Diablo), Shawn Ashmore (Bobby Drake/Iceberg), Aaron Stanford (St.John Allerdyce/Pyro), Kelly Hu (Anne Reynolds/Lady Deathstrike).
Une mystérieuse créature fait irruption dans le bureau du président des Etats-Unis et attente à sa vie. Suite à cette agression, le militaire William Stryker ordonne à ses commandos d’emprisonner tous les mutants. Les X-Men éparpillés dans la nature vont accepter de faire alliance avec Magneto et Mystique afin de libérer le Professeur Xavier.
Alors que le précèdent opus se terminait sur l'affrontement entre bons et mauvais surhommes, ce X2 annonce la guerre entre hommes et mutants, présagée par Magneto. La question était de savoir si Bryan Singer, qui devait s'atteler à une nouvelle version de Battlestar Galactica, allait privilégier la profusion d'insertions ériques au détriment des personnages. Cette fois, le scénario s'inspire du récit Dieu crée, l'homme détruit écrit par Chris Claremont en 1982.
Heureusement, Bryan Singer offre une vraie suite à l'heure où des séquelles souvent catastrophiques et continue d'exploiter la mythologie ainsi que l'essence de la BD. Ainsi, il prolonge l'intrigue du premier en développant un héros emblématique, en l'occurrence, Logan/Wolverine (Hugh Jackman toujours impeccable) en levant le voile sur son passé énigmatique tandis que Jean Grey se voit attribuer un rôle plus important. A travers ces péripéties, une nouvelle lignée de mutants est dévoilée avec Iceberg épris de Malicia, Pyro attiré par le mal et Diablo à la foi religieuse inébranlable, particulièrement émouvant grâce à l'interprétation d'Alan Cumming. Ce ne sont pas moins de trois générations qui sont représentées et près de douze personnages qui évoluent à l'écran. Quant à Brian Cox (remarquable dans la 25ème heure), il symbolise tout ce qu'il y a de plus étroit et de plus vil dans l'esprit d'un homme.
Si le propos sur le droit à la différence est nettement moins perceptible, celui sur l'esprit de cohésion du groupe reste de rigueur et se renforce même dans les moments d'adversité. A ce titre, le récit ne manque pas de gratifier le spectateur de trépidantes séquences d'action comme l'attaque de l'école, la poursuite dans les airs ou la succession de morceaux de bravoure dans la base souterraine. Même si le film sacrifie aux impératifs du blockbuster, il bénéficie toutefois d'effets visuels soignés qui se mettent au service de l'histoire (à l'image de l'évasion de Magneto) et non pas l'inverse comme l'avait démontré le désastreux Daredevil.
X-Men 2 remplit honorablement son contrat en se présentant comme un divertissement haut de gamme. Ce second épisode sème quelques pistes et esquisse de nouveaux protagonistes (une brève apparition de Colossus) qui ouvrent la voie à une éventuelle trilogie. L'aventure Marvel ne s'arrête pas là pour cette année puisque la fracassante arrivée de L'incroyable Hulk réalisé par Ang Lee, est déjà annoncée.
X-MEN : L'AFFRONTEMENT FINAL (2006)
Réalisé par Brett Ratner avec Patrick Stewart, Ian McKellen, Hugh Jackman, Halle Berry, Famke Janssen (le Phoenix), James Mardsen, Anna Paquin, Rebecca Romijn Stamos, Shawn Ashmore, Aaron Stanford, Kelsey Grammer (Hank McCoy/Le Fauve), Ellen Page (Kitty Pride/Etincelle), Daniel Cudmore (Peter Raspoutine/Colossus), Vinnie Jones (Cain Marko/Le Fléau), Ben Foster (Warren Worthington/Angel), Bill Duke (Bolivar Trask), Dania Ramirez (Callisto), Ken Leung (Maxwell Jordan/Quill), Eric Dane (Jamie Madrox/Multiple Man).
La règle est bien connue : le troisième épisode d'une franchise pâtit généralement d'un manque d'inspiration en reposant sur ses acquis. Lorsque le faiseur Brett Ratner fut nommé pour remplacer le talentueux Bryan Singer occupé à redonner vie au rescapé de Krypton, le fan du comics autant que le cinéphile pouvait exprimer une certaine appréhension. A l'arrivée, la catastrophe préméditée n'est pas au rendez-vous mais le résultat est tout de même mitigé.
Cet opus débute sur une double scène d'ouverture dévoilant la jeunesse de Jean Grey puis celle de Warren Worthington, le futur Angel. A ce stade, l'une d'elle est déjà de trop. Puis l'histoire enchaîne sur la résurrection de Jean Grey (suggéré dans le précèdent épisode) et une nouvelle guerre entre mutants dont l'enjeu est un vaccin qui annulerait leurs pouvoirs.
Bien que le réalisateur respecte les choix artistiques de son prédécesseur, sa mise en scène s'avère purement illustrative. La faute en revient également à un scénario qui n'exploite pas assez son potentiel dramatique même si il esquisse une réflexion sur la notion d'individualité. Elément émotionnel de l'intrigue, le dilemme de Logan est lui aussi relégué à l'arrière-plan. Mais surtout la trop courte durée reste surprenante pour une production de ce calibre.
De nouveaux protagonistes intègrent l'histoire qui ne prend pas le temps de les développer tellement ils sont nombreux. Ainsi Angel, le Fléau ou Callisto sont réduits à des apparitions anecdotiques. Au milieu de tout ce beau monde, seul Le Fauve trouve une place de choix parmi les anciens toujours menés par Wolverine et Storm. Si Colossus et Kitty Pride peinent à mettre en valeur leurs capacités, d'autres personnages sont vite écartés comme Mystique, Malicia et surtout Cyclope définitivement enterré alors qu'il tenait un rôle prépondérant dans le comic-book. Quant au Phœnix noir, il apparaît comme la personnalité schizophrène de Jean Grey mais vu la renommé du personnage, sa saga aurait mérité un long métrage dédié. Pourtant cet alter-ego inquiétant à souhait apporte un ton plus sombre au récit qui dénombre plus de pertes dans le clan des bons.
En dehors de ses aspects négatifs, le film est pourvu d'un rythme haletant, bénéficie d'effets spéciaux de qualité et compile d'impressionnantes scènes d'action comme les différents duels dans la maison de Jean Grey, le Golden Gate en lévitation et la prison d'Alcatraz devenu un champ de bataille entre mutants aux pouvoirs aussi variés que mortels. Et le fan n'est pas oublié avec la séquence de la salle des dangers et sa Sentinelle décapitée.
En misant sur la surenchère, cet affrontement final échoue sur le plan narratif mais respecte le cahier des charges à la lettre en assurant un spectacle de bonne facture et sans temps mort.