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LE BON, LA BRUTE ET LE TRUAND (1966)
Une chasse au trésor mythique.
Avec Pour une poignée de dollars (1964) suivi de Et pour quelques dollars de plus (1965), Le bon, la brute et le truand (1966) conclut la trilogie des "dollars" qui narre les errances de l’illustre homme sans nom. Auparavant nommé l’étranger et le manchot, ce solitaire au verbe rare fume en permanence le cigarillo et se distingue par son allure nonchalante. En s’attaquant à un genre typiquement américain, Sergio Leone donnait ainsi ses lettres de noblesse à un registre familièrement appelé le western-spaghetti tout en voulant montrer un autre visage de l’Ouest sauvage, loin des sempiternelles cavalcades entre cow-boys et indiens. En 2002, la Metro Goldwyn Mayer décida de ressortir une version prolongée de 16 minutes de ce monument.
Durant la guerre de Sécession, trois desperados se lancent à la recherche d’un butin. On se rend vite compte que le titre ne correspond pas vraiment aux protagonistes qui ont tous le vice dans le sang et dont la moralité est loin d’être le point fort, seule leur personnalité les différencie : Blondin par son intelligence, Tuco par sa stupidité et Sentenza par son sadisme.
Après une longue exposition des protagonistes (avec surimpression à l’écran), il s’ensuit une série de chassés-croisés où Tuco s’associe à Blondin puis le traque afin de se venger. L’intrigue développe alors tout son intérêt à partir de la longue traversée du désert où les deux aventuriers détiendront chacun une pièce du puzzle menant au trésor caché par les soldats nordistes. Forgeant une alliance à contrecœur, le duo est fait prisonnier dans le camp nordiste dirigé par Sentenza, devenu sergent qui déploie tout son art de la cruauté dans une séance de torture qui contraste avec une mélodie mélancolique jouée par un orchestre. La prochaine étape se présente sous la forme d’un pont où s’affrontent nordistes et sudistes et constitue l’ultime obstacle à leur soif de l’or. Le contexte est propice à une démonstration sarcastique sur l’absurdité de cette guerre civile (Blondin s’exclame de voir autant de vies humaines gâchées en aussi peu de temps).
Issu de la série télévisée Rawhide, Clint Eastwood retrouve Lee Van Cleef qui a officié comme troisième couteau dans les westerns avant d’incarner le colonel Mortimer dans Et pour quelques dollars de plus. La sobriété de leur interprétation tranche avec le cabotinage (dans le sens artistique du terme) d’Eli Wallach, remarqué en tant que chef des bandits dans Les sept mercenaires (1960).
Leone choisit le parti de démythifier l’Ouest américain en détournant les codes du western traditionnel notamment les héros trop lisses des films de John Ford ou de Raoul Walsh. Ainsi, il opte pour un second degré permanent à travers les bruitages (l’écho amplifié des balles), les personnages satiriques (le nom de famille à rallonge de Tuco et la liste interminable de ses délits), les situations outrancières (Blondin a une chance incroyable et atteint toujours sa cible) ou les répliques caustiques (le fameux et récurrent "Le monde se divise en deux catégories…"). Les rebondissements se succèdent où le hasard est souvent prétexte aux mauvaises rencontres et laissent très peu de place à la psychologie (hormis un émouvant dialogue entre Tuco et son frère).
Afin de conférer à la mise en scène une dimension épique, le cinéaste joue sur les cadres en composant de magnifiques plans larges et associe la lenteur des gestes à de gros plans sur les visages sur un rythme quasiment contemplatif comme dans le duel final d’anthologie dans le cimetière où le format cinémascope trouve pleinement sa justification. De plus, les images sont magnifiées par les sublimes partitions musicales d’Ennio Morricone qui sont en osmose avec chaque scène clé du récit.
On peut également supposer que le film soit une préquelle par le fait que l’histoire soit chronologiquement antérieure aux deux autres et qu’Eastwood s’approprie le poncho qu’il revêt dans les précédents volets. Dans ce cas, Leone serait peut-être le créateur d’un nouveau concept narratif utilisé dans une trilogie cinématographique.
Par son aspect lyrique, l’œuvre préfigure le nouveau triptyque des "Il était une fois…" (dans Il était une fois dans l’ouest, Charles Bronson, Henry Fonda et Jason Robards pourraient être le bon, la brute et le truand). Par la suite, Clint Eastwood rendra hommage à Sergio Leone en reprenant à son compte, l’énigmatique homme sans nom dans L’homme des hautes plaines (1973) et Pale Rider, le cavalier solitaire (1985). Quant au profil taciturne et très peu loquace du personnage, il servira de modèle à de nouveaux anti-héros développés à la fin des années 70 tels que Mad Max ou Snake Plissken dans New York 1997.
Fabien Rousseau
L'EDITION DVD COLLECTOR
Disque 1 :
le film dans sa version longue (2h51 incluant 7 scènes supplémentaires) avec en option les commentaires de Richard Schickel (critique/historien/écrivain et également biographe de Clint Eastwood).
Les poussières, tâches et sauts d’images ont été gommés de la précédente édition. La restauration de l’image est de très bonne qualité. Le seul défaut est contenu dans la bande son française : le volume est plus fort dans les scènes ajoutées qui ont été doublées pour l’occasion.
Disque 2 :
- L’Ouest de Leone : Le producteur Alberto Grimaldi évoque le mythe du western réinventé par Sergio Leone. Eli Wallach et Clint Eastwood racontent eux leurs anecdotes et leurs souvenirs sur le tournage qui s’est déroulé en Italie et en Espagne.
- Le style de Leone : les mêmes intervenants reviennent sur la construction narrative de l’œuvre (notamment le contraste entre plans serrés et plans larges si cher au réalisateur).
Deux reportages intéressants mais courts, on aurait également apprécié un documentaire fourni sur la trilogie des dollars.
- L’homme qui perdit la guerre civile : un documentaire sur la Guerre de Sécession qui a servi de toile de fond à l’histoire et qui revient sur la défaite de l’armée sudiste initiée par le Général Sibley.
- Le bon, la brute et le truand : la reconstitution : ce reportage relate la sortie du film dans les salles notamment le problème lié à sa durée qu’a rencontré Sergio Leone. On explore ensuite le côté technique par le biais d’entretiens concernant la restauration de la pellicule, le doublage et l’insertion des nouvelles scènes.
- Présentation d’une séquence inédite où Tuco extorque de l’argent aux habitants du village de Socorro. Celle-ci est reconstituée à partir d’images tirées de la bande-annonce française et des photos promotionnelles, le tout avec un texte descriptif.
- La version intégrale de la scène de torture de Tuco où quelques plans ont été ajoutés.
- Il Maestro (1 et 2) : Jon Burlingame, critique de musiques de films, analyse l’œuvre d’Ennio Morricone (qui a avoué s’être inspiré des hurlements de coyotes pour le thème principal) ainsi que les différents thèmes du long métrage.
- Bande-annonce française
- Galerie d’affiches internationales
- Bonus cachés : Eli Wallach et Clint Eastwood évoquent quatre anecdotes. On peut les visionner en cliquant sur les nœuds coulants qui apparaissent en haut à gauche ou à droite de la première ligne de chaque menu.